Will Eisner est le créateur en 1940 du Spirit, The référence indémodable en matière de bande dessinée policière, série à la fois palpitante, ironique et sexy. Pourtant, trente ans plus tard, il est l'initiateur avec Art Spiegelman, des graphic novels, les romans graphiques qui ont révolutionné la bande dessinée mondiale. Son talent et son opiniâtreté lui permettent bientôt d’ouvrir un studio, en compagnie de son associé Jerry Iger. Recrutant des débutants qui ont pour excuser du peu pour nom Bob Kane, Jack Kirby... l’Eisner & Iger Studio propose aux éditeurs de comic books des séries « clés en main », dont plusieurs (Hawks of the Seas, Sheena Queen of the Jungle) rencontrent un vif succès. Will Eisner revend pourtant ses parts de l’entreprise en 1940, et se lance dans l’aventure d’une bande hebdomadaire pour les journaux. Il imagine alors une série policière d’un genre nouveau donc, le fameux The Spirit, déjà cité ce fameux justicier masqué, Denny Colt, alias le Spirit. C 'est un jeune détective qui pourchasse les bandits dans les bas-fonds de Central City, ville dans laquelle il est aisé de reconnaître New York. Malfrats patibulaires, pin-ups vénales et dangereuses, Eisner joue de tous les codes mais s’oriente très vite vers un second degré qui lui permet toutes les audaces visuelles et narratives. Le succès est grand. Eisner laisse pourtant sa création à ses assistants en 1942 et s’enrôle dans l’armée US pour combattre l’hitlérisme. Rendu à la vie civile en 1945, il retrouve son héros et inaugure la meilleure période de la série, un véritable feu d’artifice créatif. Il abandonne pourtant The Spirit en 1952 et, fort de son expérience militaire, fonde American Visuals Corporation, qui se sert du dessin et de la bande dessinée à des fins de communication institutionnelle et publicitaire. Eisner est redécouvert dans la seconde moitié des années 1960 à travers la réédition des histoires du Spirit. Il sortira des œuvres moins connues et tout aussi qualitatives. Invité à enseigner la bande dessinée à la School of Visual Arts de New York, Will Eisner en tire deux livres de réflexions (Comics and Sequential Arts, Storytelling and Visual Narrative), qui en font l’un des rares auteurs/théoriciens du domaine. Fêté et récompensé (il reçoit même plusieurs fois luimême des Eisner Awards !), il ne cesse de publier et devient une référence pour les professionnels et les fans du monde entier. Il disparaît en 2005, des suites d’une intervention chirurgicale, à l’âge de 88 ans. Grand Prix du Festival d’Angoulême dès 1975, un an seulement après la naissance de l’événement, Eisner aimait Angoulême, qui le lui rendait bien. Il était normal que, l’année du centenaire de sa naissance, la Cité internationale de la bande dessinée et le Festival unissent leurs efforts pour rendre hommage à l’un des géants de la bande dessinée du XXe siècle. Happy centennial, Mr. Eisner !. Le voici plus qu'honoré, car il est plus que reconnu, par cette exposition durant le FIBD et encore après puisque l'expo durera du 26 janvier au 15 octobre.